Dans la partie nord-ouest de la ville d’Hébron, se trouve le cimetière juif karaïte, vestige d’une communauté qui, autrefois, honorait cette ville comme un lieu sacré. Situé au cœur de l’ancien quartier juif, ce site témoigne de la longue présence des Karaïtes à Hébron.
Hébron était une ville d’importance pour les Karaïtes. Ils y effectuaient régulièrement des pèlerinages solennels, psalmodiaient des prières spécifiques en l’honneur de la grotte de Machpéla, où reposeraient les patriarches et matriarches d’Israël. La communauté karaïte y était florissante jusqu’à son déclin progressif au fil des siècles.
Carte Hébron – Cimetière karaïte ( encadré en rouge )
Un lieu d’histoire et de mémoire
Au XIXe siècle, l’érudit karaïte Zedakah ben Shomron visita la synagogue locale et la décrivit comme le « gardien du tombeau », soulignant son rôle central dans le culte karaïte à Hébron.
De son côté, El Makdesi, historien arabe, évoquait la présence d’une synagogue et d’une cuisine, mises en place pour le bien-être des fidèles, riches comme pauvres.
Mais au fil du temps, la communauté karaïte perdit peu à peu ses droits sur ses propriétés. Vers 1540, le rabbin Malkiel Ashkenazi, figure ashkénaze de Safed, acquit plusieurs propriétés appartenant aux Karaïtes d’Hébron. Il est parfois mentionné comme étant originaire de Turquie (Anatolie), bien que certains récits suggèrent qu’il avait également des liens avec l’Égypte.
- Tout semblait stable jusqu’au milieu du XIXe siècle, lorsque les Karaïtes d’Istanbul tentèrent de récupérer les propriétés cédées aux Rabbanites. L’affaire fut portée devant les autorités locales, mais le verdict fut défavorable aux Karaïtes. Ce jugement scella la perte définitive de leurs biens à Hébron, marquant un tournant dans leur histoire locale. Une injustice .
Hébron aujourd’hui : Une ville divisée
Hébron, située à une trentaine de kilomètres au sud de Jérusalem, est une ville sous tension depuis des décennies. Aujourd’hui, elle est divisée en deux secteurs distincts :
- H1, sous l’Autorité palestinienne, où résident environ 170 000 Palestiniens.
- H2, sous contrôle israélien, où vivent 800 résidents juifs, protégés par une présence militaire permanente.
En 2016, la municipalité d’Hébron a entrepris une série de travaux de rénovation, incluant la restauration du cimetière karaïte.
Mais ces travaux ont-ils réellement permis de préserver ce site historique ?
Ma visite à Hébron
En 2019, j’ai eu la chance de me rendre à Hébron, explorant à la fois les secteurs H1 et H2. Mon objectif était clair : visiter le cimetière karaïte.
Malheureusement, l’entrée était verrouillée, et bien que j’aie demandé une autorisation préalable, je n’ai jamais reçu de réponse.
Pire encore, ce jour-là, en raison d’une menace d’attentat terroriste, l’armée israélienne avait renforcé la sécurité autour du cimetière. Toute tentative de négociation s’est heurtée à un mur : on m’a refusé l’accès au site à ma grande déception.
J’ai néanmoins pu prendre quelques photos depuis l’extérieur? Depuis l’extérieur, il était évident que le cimetière était en état de délabrement avancé. Mauvaises herbes envahissantes, présence de détritus, manque total d’entretien.
Un tel niveau de négligence pose une question essentielle : Pourquoi un site d’une telle importance historique est-il abandonné de la sorte ? L’attitude des autorités israéliennes est particulièrement agaçante. Alors que d’autres sites historiques d’Hébron bénéficient d’un entretien rigoureux, le cimetière karaïte semble avoir été laissé à l’abandon. Cette absence de considération révèle peut être un problème bien plus profond…
Quoiqu’il en soit, ce cimetière est le témoin silencieux d’une époque où les juifs Karaïtes avaient une place prépondérante en Terre d’Israël.
L’histoire de la communauté karaïte à Hébron ne doit pas être oublié. Il serait bon que ce lieu soit restauré et protégé, non seulement par respect du passé, mais aussi pour sa transmission aux générations futures.



Benjamin S