Hanouka est une fête juive hivernale pharisienne d’institution rabbinique qui dure huit jours. Surnommée «La fête des Lumières » , les juifs rabbiniques la célèbrent par l’allumage d’une Hanoukia chaque soir, ainsi que des bénédictions particulières.
Pour comprendre les origines de cette fête, il faut remonter au IIème siècle avant notre ère, période à laquelle la Judée sortie d’une guerre de partage entre les généraux et successeurs d’Alexandre le Grand, était sous la domination du roi de Syrie, Antiochus IV
Un événement politico-religieux comme élément déclencheur
En -165 avant JC, le royaume syro-grec d’Antiochus IV désire asseoir son autorité sur le royaume de Juda. Il souhaite « helléniser » l’ensemble de la population juive de la région et diffuser le polythéisme grec considéré par les juifs avec le culte romain comme un danger imminent d’assimilation et de destruction du peuple juif. Antiochus IV interdit alors de pratiquer le shabbat, la circoncision et les lois du cacherout. Le temple de Jérusalem est quant à lui profané et destiné désormais à la pratique du culte grec.
Matityahou ben Yohanan Hacohen, chef politique et religieux juif, grand prêtre et fondateur de la dynastie des Hasmonéens, refusa d’obéir à Antiochus IV et partit en rébellion avec des partisans juifs. Son fils, Judas Macchabée, poursuivra et mènera ensuite la révolte durant trois années.
Les Séleucides, dynastie hellénistique de l’époque sont vaincus et les Maccabées reconquièrent Jérusalem. Les juifs procédèrent alors à la purification du Temple profané et dégradé par les Grecs. Pendant cette révolte, les juifs ont cherché et on trouvé qu’une seule fiole d’huile qui pouvait allumer la ménorah durant un seul jour uniquement. Mais il est raconté qu’un miracle se produisit et les juifs arrivèrent à allumer la ménorah avec cette huile pendant huit jours. C’est ainsi que l’année suivante, les pharisiens décident alors de sacraliser cet évènement et d’instaurer huit jours comme des jours de fête, de louange et d’action faite à D.ieu et que la fête de Hanouka fit son apparition.
L’absence de la fête de Hanouka dans la Torah
La commémoration de la bataille ainsi que le miracle de la fiole d’huile ne sont ni mentionnés ni dans la Torah, ni dans les Neviim, ni dans les Ketouvim, La fête de Hanouka n’est pas d’origine biblique et n’est donc pas issue de la Torah.
La première source écrite mentionnant la fête de Hannouka est le Talmud intégrant des écrits rabbiniques « pré-talmudiques » insérés plus tard. L’histoire de l’huile qui dure huit jours n’apparaît pas dans les sources plus anciennes.
Pourquoi la fête de Hanouka est-elle célébrée en tant que fête religieuse au même titre que les fêtes de Yom Kippour, Pessah ou Soukkot,issues de la Torah, donc de la parole Divine ?
Les origines et influences païennes de Hanouka
Durant la période romaine en terre d’Israël, la fête de Saturne d’une durée de huit jours était populaire et pratiquée par les Romains installés en Judée. Cette fête se déroulait du 17 au 26 décembre et était accompagnée de festivités romaines suivie des calendes du 25 décembre au 1 janvier (huit jours) débouchant sur la nouvelle année. Elle était dédiée initialement au dieu romain de l’agriculture, Saturnus. Mais au contact de l’empire perse, la fête a évolué vers une fête de solstice au cours du premier siècle avant notre ère. Elle a donc en réalité pour origine la fête de Mithra, fête de solstice d’hiver perse qui s’était alors répandue dans tout l’empire romain. La fête de saturne a par ailleurs elle même influencé le fête de Noël et le nouvel an chrétien.
Il faut rappeler que la fête de solstice a été de tout temps un concept universel observée dans une majorité de religions monothéistes ou polythéistes aux cultures différentes. Les célébrations des solstices ont toujours été des sujets d’étude pour la sociologie, l’histoire ou l’anthropologie. Car depuis des millénaires, toutes les cultures du monde ont observé le même phénomène. La nuit et le jour le plus longs ont toujours été fêtés.
La fête de Saturne évolue donc au contact des différentes cultures et de nouveaux rituels romains furent par exemple constatés: l’allumage de bougies sur l’autel de Saturne à Rome et la coutume par exemple de s’offrir à cette occasion des bougies de cire.
Il fut observé que la pratique d’allumage des bougies s’est dans un premier un temps introduite dans la pratique rituelle de la fête du solstice d’hiver romain puis dans la pratique rituelle juive rabbinique d’allumage des bougies d’hanouka dont la date limite est la nuit du 24 au 25 du mois de Kislev.
Dans son œuvre » La guerre des juifs » le plus grand historien juif de l’époque, Flavius Joseph explique de manière précise, le lien entre Hanouka et la fête romaine de solstice d’hiver . Il écrit « Et le 25 du mois de Kislev, que les Macédoniens appellent Apelaeus, ils allumèrent des bougies dans le chandelier et les brûlèrent sur l’autel »
Dans le Talmud Yerushalmi, rabbi Acha écrit : « Combien les premiers prophètes toucheront ils la porte de l’est, que le soleil s’y réduira à l’époque de Tevet? »
Dans le traité Avodah Zarah, les rabbanim se sont référés directement à cette fête dans leurs écrits : » L’année suivante, il fixa ces deux périodes de huit jours comme jours de célébration. Il le fit pour la gloire divine mais eux (les païens, évoquant les Romains) le firent dans un but idolâtre »
Des festivités païennes à la fête de Hanouka : Une réforme socioreligieuse rabbinique
Les pharisiens ont manifestement utilisé la fête de solstice d’hiver romaine et l’histoire du miracle de la fiole d’huile pour façonner la fête de Hanouka. On peut logiquement considérer qu’ils se sont inspirés des fêtes païennes des cultes voisins dans but d’en distancer les juifs.
La proximité avec les cultes païens était considérée comme des dangers d’assimilation par les pharisiens, l’ajout de hanoukka a la liste des fêtes religieuses fut alors considéré par les rabbiniques comme un moyen de protéger les juifs des dangers d’assimilation et donc de la disparition du peuple juif.
La position du judaïsme karaïte
Les karaïtes expliquent que que D.ieu exige dans la Torah de ne rien ajouter ni soustraire d’après le commandement suivant : « Vous n’ajouterez rien à la parole que je vous commande, et vous n’en retrancherez rien » Devarim 4.2
De ce fait, les karaïtes ont toujours rejeté l’autorité des rabbins non pas en tant que sachant et érudit communautaire, mais en tant que pouvoir politico-religieux et faiseur de loi. Par exemple en ce qui concerne l’ajout et la création de lois et de jours fériés n’ayant aucun lien avec la Torah. Les rabbins n’ont donc pas le pouvoir d’établir des jours fériés.
La fête de Hanouka est considérée comme en contradiction totale avec le commandement devarim 4.2.
Hanouka n’est pas une fête biblique mais une fête pharisienne. Elle n’a donc aucun caractère divin et n’est donc pas reconnue par les karaïtes.
Benjamin Siahou