Située au cœur du quartier Abassia du Caire, la synagogue Karaïte porte le nom de Moshe Deri depuis son inauguration en 1931. Ce lieu de culte a traversé de nombreuses périodes, marqué par l’abandon progressif dû à la diminution de la population karaïte dans la région, jusqu’à sa rénovation en 2010 par les autorités égyptiennes.
Depuis des siècles, la communauté karaïte a pris racine en Égypte. Historiquement, ces fidèles se rassemblaient dans la synagogue « Rab Simcha », ancrée dans le quartier des Juifs Karaïtes, jouxtant le quartier juif traditionnel rabbinique. Toutefois, avec le temps, la dynamique socio-économique des Karaïtes a évolué, les poussant à s’éloigner géographiquement de leur lieu traditionnel de prière vers le début du XXe siècle. Cette migration a rendu leurs déplacements vers l’ancienne synagogue particulièrement difficiles lors des jours saints, ce qui a motivé la communauté à financer la construction d’un nouveau sanctuaire plus accessible.
Le projet de cette nouvelle synagogue a vu le jour dans les années 1920 sous l’égide d’Abraham (Ibrahim) Cohen, figure éminente de la communauté. Érigée sur la rue Sabil al-Kasandr à Abassia, cette structure a été conçue pour répondre aux besoins des Karaïtes résidant non seulement à Abassia mais aussi dans les quartiers voisins d’al-Dahir et de Gamrah.
La synagogue a été officiellement inaugurée en 1931. Douze ans plus tard, elle fut renommée en l’honneur de Moshe (Musa) Deri, un éminent médecin et poète karaïte du Moyen Âge. Ce changement de nom fut initié par Toviah Levi Babovitch, un responsable religieux originaire de la péninsule de Crimée, marquant ainsi une nouvelle ère pour le lieu de culte.
Sur le plan architectural, la synagogue rappelle les grandes mosquées ottomanes, avec sa majestueuse coupole soutenue par des colonnes robustes qui dominent l’espace central dédié à la prière. Elle dispose également d’une cour intérieure et d’une vaste bibliothèque, qui renfermait autrefois environ 4 000 volumes et servait de cour de justice pour la communauté.
Malheureusement, la synagogue a subi une période de négligence intense au début du XXIe siècle, avec un vol significatif de ses précieux artefacts. Fermée au public, la clé de ce trésor historique reste entre les mains de la communauté juive rabbinique. En 2010, un effort de rénovation a été partiellement entrepris par le gouvernement égyptien, dans l’espoir de préserver ce patrimoine culturel et religieux pour les générations futures.
Benjamin Siahou